01/02/18

Ne perdez pas le Nord

V. Le miel inaltérable
Le miel inaltérable au fond de chaque chose
Est fait de nos douleurs, nos désirs, nos remords ;
L’alambic éternel où le temps recompose
Les larmes des vivants et la pitié des morts.
D’identiques effets regerment de leur cause ;
La même note vibre à travers mille accords ;
On ne sépare pas le parfum de la rose ;
Je ne sépare pas votre âme de son corps.
L’univers nous reprend le peu qui fut nous-mêmes.
Vous ne saurez jamais que mes larmes vous aiment ;
J’oublierai chaque jour combien je vous aimais.
Mais la mort nous attend pour nous bercer en elle ;
Comme une enfant blottie entre vos bras fermés,
J’entends battre le cœur de la vie éternelle.
Marguerite Yourcenar, Les charités d'Alcippe*

Allégorie du désir qui porte une boussole
Artemisia Gentileschi, Allegoria dell'inclinazione, 1616[Ill.]

On ne peut perdre de vue l'étoile polaire. Perdre la boussole, c'est perdre la tête et ne plus marcher droit - Le désir vaudrait attribution de droit ? Il ne suffit pas que d'aucuns réclament la jouissance obligatoire pour qu'elle prenne force de loi et bascule en droits de l'homme.

Voici en Belgique qui mit le pied à l'étrier de la grogne contre cette supercherie. Nous nous faisons grand plaisir à les soutenir, histoire de "bomber" un peu :) Avec l'autorisation des Etoiles Digitales qui ont déjà désenclavé l'aiguille belge :
"Sans blanc seing -Féministes belges contre le droit à l’assistance sexuelle-

 Rubrique – Coup de main – Soutien et visibilité des mobilisations 
Le blanc seing, René Magritte, Huile, 1967

EtoilesDigitales offre toute sa sodalité à la carte blanche des féministes belges contre toute légalisation du proxénétisme hygiéniste, en l’occurrence pudiquement dite assistance sexuelle aux personnes handicapées et âgées :

« Le corps des femmes n’est pas à vendre 30 janvier 2018 06:00 Collectif de signa taires – Les associations de femmes s’opposent à l’organisation d’une assistance sexuelle pour les personnes handicapées et âgées, ainsi qu’à tout assouplissement des lois sur le proxénétisme et le viol. Elles dénoncent aussi une approche peu respectueuse de la vie affective et sexuelle des personnes les plus fragiles

Non, c’est non! Les personnes et associations engagées dans la défense des droits des femmes déplorent vivement l’avis du Comité consultatif de bioéthique de Belgique, rendu public le 17 janvier dernier. Elles regrettent que les membres de ce Comité aient refusé de les auditionner. En conclusion d’un avis descriptif de 47 pages, ces derniers estiment que l’assistance sexuelle « doit constituer une offre de service reconnue par les pouvoirs publics à travers un cadre réglementaire ».

De quoi parle-t-on? L’assistance sexuelle est censée répondre aux difficultés sexuelles des personnes en situation de handicap.Elle consiste, en réalité, en une prestation de service tarifée de relations sexuelles entre une personne en situation de handicap et, le plus souvent, une femme, qui serait spécialement « formée » à cet effet.

Prostitution et assistance sexuelle

Au terme d’un raisonnement contestable, le Comité veut convaincre qu’une prostitution organisée à destination des personnes en situation de handicap… ne serait pas de la prostitution. « Ceci n’est pas une pipe », autrement dit par le Comité qui cherche à établir une distinction artificielle de la prostitution avec l’assistance sexuelle… tout en livrant, en son avis, un plaidoyer visant à adapter notre législation sur le proxénétisme et, plus dangereux encore, sur le… viol, notamment en matière de consentement.

A l’heure actuelle, toute personne qui pratique ou organise l’assistance sexuelle, ce qui est déjà le cas de certains « intermédiaires » et associations, s’expose à des poursuites pénales pour proxénétisme.
L’avis est basé exclusivement sur l’audition de personnes issues du secteur du handicap, de l’assistance sexuelle, aux côtés de quelques juristes ou sexologues. Les associations de femmes sont pourtant concernées par la thématique, dès lors qu’il s’agit en très large majorité d’assistantes sexuelles, utilisées comme des outils à des fins utilitaristes ou fonctionnalistes.

Pourtant, le Comité ne peut cacher une partie de la question: en éthique, la fin légitime ne justifie pas les moyens. Les moyens pour arriver à une fin légitime doivent aussi être légitimes. Or, la condition nécessaire pour un épanouissement de la sexualité est une relation respectueuse, non pas une aliénation à autrui.

Ne nous méprenons pas: les personnes et associations engagées dans la défense des droits des femmes sont sensibles aux souffrances de toutes personnes qui, pour des raisons diverses, peinent à nouer des relations affectives et sexuelles. Mais considérer que la sexualité des personnes handicapées devrait s’envisager sur le mode pulsionnel et dans un rapport de nature monétaire leur semble aussi constituer, au regard de la ségrégation sociale déjà pratiquée à l’égard des personnes souffrant d’une invalidité, une atteinte supplémentaire à leur dignité.

En vain, les 15 et 23 mars 2017, plusieurs associations de défense des droits des femmes et de victimes avaient pourtant adressé au Comité des courriers demandant officiellement à être auditionnées.

95% des victimes d’exploitation sexuelle sont des femmes et des filles.
Dès 2013, le Conseil des femmes francophones de Belgique avait en effet pris position contre l’assistance sexuelle au regard de son impact sur les droits des femmes, en estimant que l’assistance sexuelle est une atteinte au principe légal de non-marchandisation du corps humain et, surtout, du corps des femmes (95% des victimes d’exploitation sexuelle sont des femmes et des filles); il s’agit là également d’une nouvelle tentative de professionnalisation et de banalisation de la prostitution, sous couvert de la rendre respectable pour une minorité, alors même que l’ensemble des autorités belges a fermement condamné le recrutement d’étudiantes à des fins de prostitution, suite à la polémique suscitée par la campagne de publicité « Rich Meet Beautiful » exercée sur les campus, à l’automne 2017.

L’avis du Comité consultatif de bioéthique anticipe d’ailleurs déjà, dans son avis, l’extension du système de l’assistance sexuelle à d’autres types de publics, comme les personnes âgées.

Il se réfère, pour fonder sa position, sur l’expérience de la Suisse romande, où le proxénétisme est entièrement légalisé. Ce faisant, il passe entièrement sous silence la Convention des Nations Unies de 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui, ratifiée par la Belgique en 1965.

Or, donner un cadre légal à l’assistance sexuelle contribuerait à accroître la demande en matière de services sexuels contre rémunération, à favoriser une approche réglementariste de la prostitution, à augmenter toutes les formes de prostitution — forcée ou non — ainsi que l’ensemble des trafics et types de criminalité associés.

85%  des personnes prostituées en Belgique sont dans des situations d’exploitation sexuelle.
Rappelons que 85% des personnes prostituées en Belgique sont dans des situations d’exploitation sexuelle (chiffres de 2013 de la police); une catégorie importante des personnes livrées à la prostitution est issue des réseaux de la traite des êtres humains (en Europe, 90% de la traite des êtres humains concerne l’exploitation sexuelle, ce sont des femmes dans 95% des cas).

Quand c’est non, c’est non

Il apparaît que la majorité des victimes ne signale pas à la police ni à un autre organisme et les auteurs de violences sexuelles graves ne sont que très rarement (8,8 %) confrontés à la justice et pour ainsi dire jamais (1,6%) condamnés.
Les personnes qui défendent les droits des femmes s’opposent aussi à un assouplissement législatif en matière de viol et de consentement. Quand c’est non, c’est non. Notre législation inadaptée demande plutôt à être renforcée, dans le sillage de ce qui a été révélé à la suite de l’affaire Weinstein et du #MeToo sur les réseaux sociaux. En Belgique, plus d’1 femme sur 3 a déjà subi des violences physiques et/ou sexuelles au cours de sa vie. Il apparaît que la majorité des victimes ne signale pas à la police ni à un autre organisme et les auteurs de violences sexuelles graves ne sont que très rarement (8,8%) confrontés à la justice et pour ainsi dire jamais (1,6%) condamnés (Amnesty International/SOS Viols, 2014).

De surcroît, une modification du Code pénal applicable au crime de viol fragiliserait encore plus les femmes handicapées, qui sont elles-mêmes régulièrement victimes d’agressions sexuelles.

Les associations de femmes estiment donc que le Comité consultatif de bioéthique fournit une mauvaise réponse à un vrai problème: celui de toutes les personnes en situation de handicap, femmes comme les hommes, qui ont le droit de vivre leur sexualité dans l’authenticité et la dignité.

Elles recommandent une approche de la thématique qui soit équilibrée et respectueuse des lois, sur la base d’un apprentissage aux thématiques de la vie relationnelle, affective et sexuelle, comme le fait par exemple la Suède en prônant une approche holistique et sensible de la personne handicapée via le développement d’un plan individualisé d’aide aux personnes handicapées qui souhaitent mieux appréhender cette dimension de leur existence.

* Céline Fremault, ministre; Catherine Fonck, députée; Joëlle Milquet, députée; Viviane Teitelbaum, députée et présidente du Conseil francophone des femmes de Belgique; Céline Delforge, députée; Dorothée Klein, Sandrine Cnapelinckx et Donatienne Portugaels, présidente et vice-présidentes des Femmes cdH; Pascale Maquestiau, Valérie Lootvoet et Berengère Marques Pereira, présidente, directrice et administratrice de l’Université des Femmes; Lidia Rodriguez Prieto, pour le Monde selon les femmes; Marie Ramot, militante à Osez le féminisme Belgique (Be Feminist); Sophie Jekeler, fondatrice et directrice de la Fondation Samilia; Pierrette Pape, présidente de l’asbl Isala; Ariane Dierickx, directrice générale de L’Ilot-Sortir du sans-abrisme; Sylvie Lausberg, psychanalyste, historienne; Isabella Lenarduzzi, présidente-fondatrice de JUMP; Patric Jean, réalisateur de « La domination masculine » https://www.lecho.be/opinions/carte-blanche/Le-corps-des-femmes-n-est-pas-a-vendre/

Désormais en France depuis 2012 sur le modèle dit suédois, les proxéneurssont désignés coupables, et nulle exception ne peut y être portée.

De plus, nous conclurons sur l’expression du refus de deux parties.

L’une, en toute conformité aux textes fondateurs, du Comité national d’éthique français de banaliser et autoriser la règlementation d’une branche proxénète.
La protection toute particulière due aux citoyennes plus vulnérables nous enjoint à rejeter toute prise de risque à leur égard :

« D’une part, les bénéficiaires sont des personnes vulnérables et susceptibles d’un transfert affectif envers l’assistant sexuel possiblement source de souffrance. D’autre part, rien ne peut assurer que l’assistant sexuel lui-même ne va pas se placer en situation de vulnérabilité par une trop grande implication personnelle. » cité ici http://www.liberation.fr/societe/2013/03/12/le-comite-d-ethique-rejette-l-assistance-sexuelle-aux-handicapes_888103

« (…) refus d’instaurer dans notre pays un droit à la sexualité : Il semble difficile d’admettre que l’aide sexuelle relève d’un droit-créance assuré comme une obligation de la part de la société et qu’elle dépende d’autres initiatives qu’individuelles. Pour le Comité, qui voit le devoir immanquablement lié au droit, il ne peut être considéré comme éthique qu’une société instaure volontairement des situations de sujétion même pour compenser des souffrances réelles« , cité ici http://susaufeminicides.blogspot.fr/2010/07/abolition-sans-concession-de-la.html

Ainsi  qu’une autre, non moins pertinente,

« Au contraire, certains, comme nous, sont fondamentalement opposés à la mise en place d’un tel système auquel semblent (…) L’assistance sexuelle : une mauvaise réponse fondée sur des idées erronées…« 
http://clhee.org/2016/04/20/nous-ne-sommes-pas-des-indesirables/

Note

Blanc seing – Autorisation, permission donnée au moyen d’un cachet sans encre
voir http://www.cnrtl.fr/definition/blanc-seing

A savoir - Technique sur papier utilisée pour les ouvrages en braille - Exemple

Russian_Braille_chart https://en.wikipedia.org/wiki/Russian_Braille

Christine Gamita
Ph. D. Ethnologie
  • Note de bas de billet*
Marguerite Yourcenar, Les Charités d'Alcippe, 
Alcippe offre son cœur aux Sirènes, son âme aux statues de marbre, son corps aux morts et, déjouant ainsi la Mort, existe à tout jamais dans ce qu'il a donné. Tel est le thème du poème qui donne le titre à ce recueil. En tout cinquante-cinq pièces, écrites entre 1929 et 1963. Ces poèmes empruntent des formes régulières : alexandrins, hexasyllabes, octosyllabes, rimes plates, rimes croisées, sonnets... On y reconnaît l'inspiration de l'écrivain amoureuse de l'antiquité grecque, de l'Italie de la Renaissance mais qui se veut aussi à l'écoute de son temps. Poème extrait de https://www.poemes.co/le-miel-inalterable.html
  • Crédit d'illustration de l'introduction
[Ill.] Illustration - Allégorie du désir -- Artemisia Gentileschi, "Allegoria dell'inclinazione", 1616 https://img.over-blog-kiwi.com/1/50/79/88/20170220/ob_70cfae_185px-a-gentileschi-allegoria-dell-inc.jpg 

La violence peinte par Artemisia 
https://cieljyoti.wordpress.com/2012/03/27/artemisia-gentileschi-1593-1652-2/

Artemisia Gentileschi, peintre de l’héroïsme féminin http://journals.openedition.org/marges/773
Pour vous servir de ma découverte biographique et de l'histoire pour le cinéma notamment, vous seriez bien aimable de penser aux droits d'auteur., que je n'ai pas abandonnés. 
Pour citer cette ressource, mentionner votre date de consultation sous la forme 
(consulté le x … 20…) 
Auteur : Christine Gamita Droits d'auteur : Creative Commons by-nc-sa 3.0 FR
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